PEDAGORE 010

Site pédagogique concernant l'enseignement et l'apprentissage instrumental et musical


 

 
présentation du Site
Luc Fuchs Journal de Cours 2005-2006 

Cours de clarinette, Conservatoire Populaire de Musique, Genève

"Journal" ouvert rapportant événements et réflexions, ainsi que quelques interrogations en résonances de mes cours de clarinette. Traces jalonnant mon enseignement cette année, aidant à en notifier l'évolution, et aussi l'évaluation.

Journal ouvert (extraits), sans prétention de modèle ou de publication véritable, mais pouvant susciter d'autres réflexions, des réactions, des partages de questionnements, des échanges d'expériences, et pouvant à sa manière alimenter le débat et la réflexion pédagogiques. Juste quelques éléments relevés lors de la réalité des cours, en fonction des situations présentes... Eléments à reprendre dans une réflexion plus approfondie, avec l'éclairage d'autres expériences et réalités de situations de cours...

La "tenue" du journal n'est pas (assez) régulière, et se partage avec les éléments "Notes de cours"; réalisation à affiner et développer par la suite.

Contacts, réactions, suggestions: lucfuchs@pedagore.ch

Attitude par rapport à l'élève
(septembre 2005)
Nouvelle piste visitée
(septembre 2005)
Occuper le son
(septembre 2005)
Transmission orale
(octobre - novembre 2005)

Ne pas réfléchir…
(novembre 2005)
Energie du morceau, sens sonore et musical
(novembre 2005)
Mémoire de notes
(novembre 2005)
Evaluation – questions d’anticipation
(novembre 2005)
Composer – écrire son matériel d’apprentissage
(janvier 2006)


   
   


Attitude par rapport à l'élève
(septembre 2005)


Septembre 2005, "rentrée"

Quelques questionnements sérieux m'habitent en donnant mes cours lors de cette rentrée.

Conséquence de réflexions déjà présentes auparavant, mais renforcées suite aux journées de formation continue de la Fédération des Ecoles Genevoises de Musique (où j’ai suivi les séminaires sur la didactique et la recherche donnés par Eddy Schepens), ainsi que diverses lectures et rencontres, notamment avec les formateurs du Cefedem Rhône-Alpes. Rencontres passionnantes, donnant (ou plutôt renforçant) une envie de recherche pédagogique.
Je comprends ainsi peut-être mieux les professeurs "déstabilisés" par de nouvelles réflexions.

  • Comment susciter l'élève à (se) poser les questions pour ensuite s'imaginer les réponses ?
  • Comment trouver l'équilibre entre information directement transmise et "autonomie" de l'élève à se prendre en charge ?
  • Que proposer à l'élève comme "mission" de recherche pour l'aider à s'approprier son apprentissage ?


Nouvelle piste visitée

(septembre 2005)


Première leçon donnée par un autre élève

Ayant cette rentrée plusieurs élèves "débutant", j'ai demandé pour trois d'entre eux, à l'élève ayant la leçon juste avant de leur donner leur première leçon. Expérience fort intéressante, avec des élèves bien différents:

  • Élève débutante de 8 ans, élève précédente de 11 ans, 3ème année de clarinette
  • Elève débutante de 15 ans, élève précédente de 15 ans (palier III)
  • Elève débutant de 17 ans, élève précédent de 16 ans (Palier II)

Cela amène un intérêt pour chacune des personnes concernées: élève débutant, élève précédent, professeur

L'élève débutant est "initié" par un de ses pairs, ce qui crée déjà un contact particulier, et offre une géométrie "triangulaire" intéressante. D'autre part, l'idée de l'ouverture à la notion de groupe est naturelle; la musique se vit directement à plusieurs, dans une complémentarité enseignement individuel / enseignement en groupe.

Pour l'élève "initiant", cela l'amène à (re)considérer son approche de la clarinette, à imaginer et formuler les consignes et indications nécessaires, à chercher et trouver l'aide et les conseils qu'il peut apporter, et peut-être à mieux comprendre l'activité du professeur par rapport à l'élève. Et aussi comme pour l'élève "initié" l'aspect relationnel.

Pour le professeur, cela permet un autre regard sur l'élève "initiant", à percevoir sous un autre angle certains aspects de son jeu, de son approche de l'instrument, de sa faculté à formuler des idées, de sa faculté d'observer et d'imaginer des solutions…

En tant que professeur, je peux autant travailler avec "l'initiant" pour l'aider à trouver les consignes et solutions, qu'avec l' "initié" dans son apprentissage, et aussi les deux à la fois pour quelques éléments développables en commun.

Le bilan direct après ces expériences pour moi est positif, enrichi de découvertes et perspectives nouvelles; expérience à poursuivre et reconduire…


Occuper le son
(septembre 2005)


Pour permettre à l'élève de travailler sur le son, sur sa matière "première", il est important de trouver comment l'élève peut "occuper" le son de manière naturelle, dans son jeu exploratoire, dans sa situation de découverte.

  • Se déplacer avec le son – déplacer le son dans l'espace de la pièce
    "Amener le son quelque part, le faire voyager"
    • Possibilité de se déplacer uniquement lorsque le son est présent
    • Les pieds, le corps "suivent" le son
    • Différents mouvements pendant le son: tourner sur soi – se lever/s'asseoir – parcourir la pièce du regard – observer ce qu'il y a dans la pièce - …
    • Dans l'espace (avec aussi le paramètre de la hauteur)
      • A deux: en alternance, en intervenant dès que l'autre s'arrête
  • Dessins sonores dans l'espace
    • En jouant avec les paramètres de hauteur, intensité, longueur: "explorateur de sons"
    • Prolongement, "vie sonore" d'un objet, d'un élément existant
      • Exemple: au mur il y avait des bricolages et dessins d'oiseaux; avec l'instrument, donner vie à cet oiseau


Transmission orale

(octobre - novembre 2005)


Entre deux élèves : l’un fait apprendre un morceau à l’autre…

Morceau improvisé, composé (par l’élève), mélodie connue, composition (partition).
Sans paroles, uniquement avec l’instrument.

L’élève doit trouver comment délimiter les passages pour élaborer l’apprentissage par l’autre élève du morceau.

Comment être suffisamment clair pour être compris… Le jeu de l’élève « initiant », et ses choix pour aider l’autre élève à apprendre devant être suffisamment explicites.

En improvisation (ou "invention sur le moment"), l’enjeu pour l’élève « initiant » est aussi de se mémoriser de ce qu’il a proposé, de "construire" le morceau, d’être compréhensible.


Ne pas réfléchir…

(novembre 2005)


Différencier la réflexion, l’ "intellectualisation", la "cérébralisation" de ce que l’on va jouer. Que cela soit en improvisation, avec partition, ou en imitation / reproduction, laisser la réflexion en favorisant l’écoute, de ce que l’on a entendu, de ce que l’on entend, de ce que l’on va faire entendre, de développer la confiance de l’écoute.

"Ne pas réfléchir", mais "penser" à ce que l’on joue, "être" dans ce que l’on joue, dans ce que l’on (doit) écoute(r).


Energie du morceau, sens sonore et musical

(Eleve de certificat, novembre 2005)


A partir d'un mouvement d'une sonate (Draeseke, 1er mouvement).

Comment trouver dès le début du jeu et du travail la bonne énergie quand à la musique proposée par le compositeur, comment trouver l’attitude sonore des notes de la partition, comment en chercher le sens, comment y donner sens. Comment "lire"la partition, au-delà des signes indiquant les hauteurs et rythmes. Et aussi, comment contrôler le "justesse"de ce qui est joué par rapport aux indications de la partition.

« De chercher cela, et de trouver des solutions à ces questions motive pour le travail, donne envie de jouer »


Mémoire de notes

(novembre 2005)


Proposer – se rappeler – mémoriser – jouer – écrire – créer – développer – ouvrir…


Evaluation – questions d’anticipation
(novembre 2005)


Comment l’élève peut-il intégrer l’évaluation dans son apprentissage, dans son(ses) action(s) musicale(s) ?

Comment aider à ce que l’évaluation de son action puisse l’aider dans sa progression, dans la bonification de son jeu, dans un passage particulier ou en général.

En le questionnant sur l’écoute et le ressenti de ce qu’il vient de jouer, l’élève est souvent, dans un premier temps perplexe et désemparé. Dans cette situation, un travail sur la mémoire, sur le souvenir qu’il a inconsciemment de ce qu’il vient de jouer permet déjà un premier travail d’approche.

Dans un pas suivant, en lui demandant de rejouer la passage en portant l’attention sur (en ouvrant l’écoute plus spécialement sur) un paramètre ou un élément précis, souvent le jeu est déjà amélioré, non parce que c’est la deuxième fois qu’il le joue, mais de par l’ouverture, l’activation de l’écoute qu’il est amené à entreprendre. Si l’objectif de l’évaluation est énoncé auparavant, l’attention est mise en éveil, l’attitude avec. [appréciation du son, de son évolution au long d’une note, comparaison d’éléments de staccato, synchronisation avec un autre élève, intonation, équilibre sonore, compréhensibilité, rapport au texte, contenu d’une improvisation, etc.].La capacité de l’élève à s’auto-évaluer serait également un élément à mettre en jeu dans l’évaluation de l’élève, jalon sur son chemin de progression dans le domaine.

Comment susciter chez l’élève cette mise en éveil dans son jeu, cette attitude d’observation « active » ?

Comment l’amener à se donner lui-même des objectifs d’écoute, de devenir et d’être acteur de son jeu, et du façonnage de celui-ci ?

Comment travailler l’évaluation avec l’élève ?

Par rapport à l’évaluation en général, ou plutôt dans l’ensemble de ses particularités, si les objectifs sont clairement définis, cela conduit à un attitude d’écoute plus ouverte, à une mise en disponibilité d’évaluation et par là est devient une contribution bénéfique à la progression, à l’évolution. Cela dans les diverses situations d’évaluation : d’un élément de jeu, d’un extrait de morceau, d’un morceau, d’un projet, d’un élève, d’un professeur, d’une démarche, d’un enseignement, d’un Ecole…


Composer – écrire son matériel d’apprentissage
(janvier 2006)


Comment introduire la partition dans l’apprentissage des élèves ? Dans la situation présente, il s’agit de deux élèves (15 – 17 ans) « débutants » en clarinette mais ayant déjà depuis un certain nombre d’années (et la continuant) une pratique d’un autre instrument. Découvrant et explorant l’instrument et le langage musical instrumental sous différentes formes, essentiellement oralement, cela implique pour eux d’autres repères que ceux qu’ils ont connu dans l’apprentissage de leur « premier » instrument , avec notamment la question explicitement et/ou implicitement posée d’avoir une partition.
Ce qui concerne le sujet présenté ici, c’est une manière d’approcher la partition avec ces élèves, de les rendre acteurs de celle-ci, et « réciproquement », que celle-ci soit trace de leur action.
En partant d’éléments avec lesquels se déroulait un jeu d’entrée en son, en « activité musicale instrumentale » (éléments différents pour chacun puisque en lien avec eux à ce moment précis), prendre un temps pour « arrêter » quelques propositions, et les « fixer », d’abord dans le jeu, avec une mise en mémoire, puis sur partition. Dans un premier temps, ils jouent une proposition, définissant ainsi une idée de pulsation, de mesure, de « couleur » tonale, d’intention. Quelques interrogations aident à définir ce point de départ ; une fois ce premier élan trouvé et défini, je le note ; pour ce faire, ils doivent être suffisamment compréhensibles de par leur jeu pour que la « trace » de la partition permette de retrouver ce qu’ils ont joué. La première phrase trouvée et jouée, en imaginer une deuxième, suite ou conséquence, voire rupture d’avec la première. Ainsi de suite, ils proposent quelques phrases que je note selon ce que j’en perçois. Le travail suivant, pour eux, d’ici à la prochaine leçon est de retravailler ces proposition, ainsi que la partition pour l’affiner selon leurs intentions, de les compléter pour un faire un morceau plus complet, qu’ils puissent jouer eux, mais aussi qu’ils puissent « faire jouer » par d’autres en retrouvant leur morceau. Il est important que le jeu précède la partition, la définition des phrases précédant la transcription, même si des modifications restent ouvertes lors de « relectures ». Ainsi, la partition rempli ses rôles de trace de composition et aussi d’objet de transmission ; le « vrai » (relatif) étant le jeu en temps et situations réels.